La loi 3DS et l’immobilier - III.- Les évolutions relatives à la vente, la location et la copropriété

par Olivier BEDDELEEM - Chargé de cours, EDHEC Business School
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III.- Les évolutions relatives à la vente, la location et la copropriété

A.- La location

Le dispositif d’encadrement des loyers mis en place par la loi ALUR sera prolongé et pourra même être élargi à de nouveaux territoires. L’article 85, modifiant l’article 140 de la loi ELAN, donne compétence à la commission départementale de conciliation pour examiner les actions en diminution de loyer dans les cas où un bailleur ne respecte pas l’encadrement des loyers prévu dans sa commune. Il ajoute un nouvel article au terme duquel «en cas de colocation du logement définie à l’article 81 de la loi n° 89462 du 6 juillet 1989 précitée, le montant de la somme des loyers perçus de l’ensemble des colocataires ne peut être supérieur au montant du loyer applicable au logement en application du présent article». La loi ELAN a donné le pouvoir au représentant de l’Etat dans le département de mettre en demeure un bailleur de se conformer au dispositif d’encadrement des loyers. La loi 3DS modifie l’article 140-VII de la loi ELAN pour lui permettre de déléguer ce pouvoir notamment aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat. 

Après les abus constatés dans les secteurs soumis à l’encadrement des loyers (l’observatoire des loyers de la fondation Abbé Pierre relayait dans la presse le fait que 35 % des annonces à Paris dépassaient les plafonds) , la loi 3DS modifie l’article 2-1 de la loi de 1989 et prévoit que «les annonces relatives à la mise en location d’un logement soumis à la présente loi mentionnent des informations relatives au bien concerné et aux conditions tarifaires de cette mise en location et, dans les territoires où s’applique l’arrêté mentionné au I de l’article 140 de la loi n° 20181021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, à l’encadrement des loyers. La liste de ces informations est fixée par arrêté du ministre chargé du logement pour les annonces émises par les non professionnels». 

L’article 140 permet aux gestionnaires de résidences universitaires qui ne sont pas totalement occupées après le 31 décembre de chaque année de les louer les locaux inoccupés pour des séjours d’une durée inférieure à trois mois s’achevant au plus tard le 1er octobre de l’année suivante, particulièrement à des publics reconnus prioritaires par l’État.

Après l’expérimentation des dernières grandes lois sur le logement, le législateur confirme la pertinence des offices fonciers solidaires. L’article 106 de la loi 3DS étend leur champ d’application et adapte leur statut, notamment à l’article L. 329-1 du Code de l’urbanisme. Ce même article 106 permet au gouvernement d’adopter une ordonnance dans un délai d’un an permettant aux organismes de foncier solidaire, dans le cadre d’un bail de longue durée, de consentir à un preneur, en contrepartie d’une redevance et avec des plafonds de prix de cession et, le cas échéant, de loyers, des droits réels en vue de la location ou de l’accession à la propriété de locaux d’activités dans le cadre de l’exercice de leur objet à titre subsidiaire. 

 

B.- Les HLM  

La loi 3DS permet aux collectivités de fixer des objectifs d’attribution de logements sociaux aux ménages aux revenus modestes dont les métiers ne peuvent être exercés en télétravail. 

La protection des personnes en situation de handicap sera renforcée. Une personne peut saisir sans condition de délai la commission de médiation HLM lorsque le demandeur ou une personne à sa charge est logé dans un logement non adapté à son handicap. La loi leur permet en effet de saisir la commission de droit au logement opposable (DALO). 

L’article 87 prévoit que les loyers des logements HLM (art. L. 442-1 du CCH) et des logements conventionnés (art. L. 353-9-3 du CCH) sont révisés non plus «en fonction» mais «dans la limite» de la variation de l’indice de référence des loyers. 

L’article 88 ajoute à l’article L. 442-8-1 du Code de la construction et de l’habitation, une nouvelle option pour les organismes HLM. Par dérogation à l’article L. 442-8, les organismes mentionnés à l’article L. 411-2 peuvent louer, meublés ou non, des logements «éventuellement en vue d’une souslocation dans le cadre d’une colocation définie au I de l’article 81 de la loi n° 89462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 861290 du 23 décembre 1986». 

 

C- La copropriété

L’application de la loi ELAN à la mise à jour des règlements de copropriété a fait couler beaucoup d’encre et entraîné de réelles craintes chez les professionnels de l’administration de biens. L’article 206 de la loi ELAN prévoyait en effet que les copropriétés devaient mettre à jour leur règlement de copropriété dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi s’agissant des lots transitoires, des parties communes à usage privatifs et des parties communes spéciales. Les syndics de copropriété devaient quant à eux mettre à l’ordre du jour annuellement pendant ces trois ans la question de cette mise à jour. 

Le flou qui entourait ces obligations, clarifiées en partie par le GRECCO en 2021, et en raison de l’épidémie de COVID, ont conduit à des retards dans cette mise à jour. C’est d’autant plus vrai que la mise à jour des règlements de copropriété nécessiterait dans un premier temps de réaliser un audit des règlements, une collecte importante d’informations sur les procès-verbaux d’assemblée générale voire les actes de vente des lots, puis éventuellement le vote de résolutions à différentes majorités, avant de pouvoir éventuellement proposer une mise à jour. La loi ELAN n’ayant pas prévu les conséquences de l’inobservation de l’obligation de mise à jour, les juristes étaient divisés sur une éventuelle perte des droits du titulaire. La question se posait également, après le 23 novembre 2021, de la subsistance d’une obligation du syndic de porter à l’ordre du jour la question de la mise à jour du règlement de copropriété. 

La plupart de ces questions sont résolues par l’article 89 de la loi 3DS qui modifie l’article 206 de la loi ELAN. 

Premièrement, la loi réglemente la situation dans laquelle la mise en copropriété est postérieure au 1er juillet 2022. Selon ce nouvel article, «les dispositions relatives au lot transitoire de l’article 1er de la loi n° 65557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont applicables qu’aux immeubles dont la mise en copropriété est postérieure au 1er juillet 2022». De même, «l’article 64 de la loi n° 65557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis n’est applicable qu’aux immeubles dont la mise en copropriété est postérieure au 1er juillet 2022».

Si la mise en copropriété est antérieure au 1er juillet 2022, «quand le règlement de copropriété ne mentionne pas la consistance des lots transitoires existants, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de cette mention dans le règlement de copropriété. Cette décision est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présentés, représentés ou ayant voté par correspondance». De même, «quand le règlement de copropriété ne mentionne pas les parties communes spéciales ou à jouissance privative existantes, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de cette mention dans le règlement de copropriété. Cette décision est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présentés, représentés ou ayant voté par correspondance». 

La loi 3DS s’intéresse également aux sanctions de l’absence de mise à jour pour ces règlements. Pour le législateur, «l’absence de mention de la consistance du lot transitoire dans le règlement de copropriété est sans conséquence sur l’existence de ce lot» et s’agissant des parties communes spéciales ou à jouissance privative existantes, «l’absence d’une telle mention dans le règlement de copropriété est sans conséquence sur l’existence de ces parties communes».