[URBANISME] Veille.- Cour des comptes.- Enquête.- Permis de construire.- Qualité de service

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Cour des comptes, La délivrance des permis de construire, 26 septembre 2024

Une enquête de la Cour des comptes s’est penchée sur la délivrance des permis de construire afin d’apprécier la qualité de service rendu aux demandeurs d’autorisations du droit des sols. Dans cette perspective, ont été pris en considération le contexte mouvant et stratifié du droit de l’urbanisme ainsi que les modalités complexes de la mise en œuvre des politiques publiques locales en la matière, conduisant potentiellement à qualifier d’inextricable l’environnement du permis de construire pour des pétitionnaires. A cet égard, le permis de construire apparaît alors comme étant la traduction locale d’un droit de l’urbanisme complexe, onéreux et opaque. Après avoir souligné que l'urbanisme génère un important contentieux, représentant environ un tiers des ressources des tribunaux administratifs et observé que les délais d'instruction en matière d’attribution d’un permis de construire sont généralement respectés, la Cour relève que la délivrance des autorisations d’urbanisme présente des biais. Sont ici notamment visées l’apparition, envers les promoteurs immobiliers, d’un urbanisme négocié ou contraint à travers les «chartes de l’urbanisme», ou, pour les pétitionnaires particuliers, des demandes de pièces complémentaires non obligatoires lors de l’instruction des dossiers. S’agissant spécifiquement des chartes d’urbanisme ou des labels auxquels recourent les collectivités locales, il est observé que de telles pratiques contraignent le pétitionnaire à cheminer hors du champ strictement légal et à participer à un dialogue d’experts avec les élus pour lequel il n’est pas toujours en position équilibrée. Après avoir souligné le paradoxe d’une inadéquation entre le temps long des procédures d’adoption ou d’évolution des documents d’urbanisme, et le temps court de l’action publique locale, le rapport insiste également sur le véritable décalage existant entre, d’une part, un droit de l’urbanisme complexe et instable, mettant en œuvre localement des procédures lourdes et onéreuses et, d’autre part, le constat d’une faible intelligibilité pour les pétitionnaires, issu de la multiplication, par les élus eux-mêmes, de stratégies de contournement et, au final, d’un respect parfois relatif de la norme applicable. De surcroît, l’empilement de législations mêlant plusieurs Codes, combiné avec l’obligation de mise en compatibilité des différents documents de planification urbaine, crée une complexité et une insécurité juridique permanente pour tous les acteurs de la chaîne d’instruction des décisions d’urbanisme. Les évolutions constantes de l’état du droit et la longueur des procédures permettent aux requérants contestataires de disposer de stratégies multiples de recours, qui congestionnent les tribunaux et peuvent déboucher sur des décisions d’annulation des documents d’urbanisme de référence au niveau local. La Cour formule alors plusieurs propositions d’amélioration : mettre en place des formations adaptées aux besoins des agents exerçant dans les services décentralisés et déconcentrés, afin de permettre l’émergence d’une véritable filière de l’instruction et du contrôle de l’urbanisme ;  fixer une obligation d’informer les pétitionnaires qui ont obtenu un certificat d’urbanisme lorsqu’une révision de la carte des risques est décidée postérieurement à cette obtention ; améliorer la fluidité de l’instruction en ligne, notamment en interfaçant les bases de données des services obligatoirement consultés (service départemental d’incendie et de secours, architectes des bâtiments de France) ;  donner aux pétitionnaires, dès le début de la procédure d’instruction de leurs demandes d’autorisation, les informations nécessaires à la bonne préparation de leur projet (procédure classique, procédures d’exception, taxes prévisibles). Au titre de la sécurisation des procédures,  la Cour préconise de proscrire l’usage de documents à contenus prescriptifs ou similaires, sans base, ni compétence légale, s’ajoutant aux dispositions des plans locaux d’urbanisme ou plans locaux d’urbanisme intercommunaux tels que des chartes d’urbanisme. Enfin, au titre des mesures de clarification, il est recommandé de garantir aux pétitionnaires ayant obtenu un permis tacite, la communication, sur simple demande, d’un certificat prouvant le dépôt des pièces et la date de transmission au préfet.