[2018-11] - Classement d’un bâtiment dans le domaine public en vue d’un aménagement futur

par Guilhem GIL - Maître de conférences Aix-Marseille Université
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JO Sénat du 27 septembre 2018, p. 4910. Rép. minist. n° 03235.

Saisi de la question de savoir si une commune peut, par une simple délibération du conseil municipal, décider de classer dans son domaine public avec effet immédiat, un bâtiment dont elle envisage l’aménagement dans un futur lointain afin d’y installer des services communaux, le ministre de l’intérieur a souligné que l’article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) précise que le «domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public». Avant l’entrée en vigueur du Code, l’aménagement spécial pouvait être simplement «virtuel», dès lors que la dépendance était destinée à être aménagée pour une affectation à un service public (Conseil d’État, 6 mai 1985, n°  41589 - 41699). Depuis l’entrée en vigueur du CG3P le 1er juillet 2006, seuls peuvent être classés dans le domaine public les biens qui ont déjà fait l’objet d’un aménagement indispensable (CE, 8 avril 2013, n° 363738) et non ceux qui feraient l’objet d’un tel aménagement dans un futur lointain. Ainsi que le Conseil d’État l’a précisé explicitement dans sa décision n° 363738 du 8 avril 2013, «l’article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques (…) exige, pour qu’un bien affecté au service public constitue une dépendance du domaine public, que ce bien fasse déjà l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public». Toutefois, le Conseil d’État a depuis admis une exception à ce principe en précisant que «quand une personne publique a pris la décision d’affecter un bien qui lui appartient à un service public et que l’aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public peut être regardé comme entrepris de façon certaine, eu égard à l’ensemble des circonstances de droit et de fait, telles que, notamment, les actes administratifs intervenus, les contrats conclus, les travaux engagés, ce bien doit être regardé comme une dépendance du domaine public» (CE, 13 avril 2016, n° 391431). Le classement dans le domaine public peut donc intervenir sur ces bases, ce qui exclut de fait l’hypothèse d’un aménagement envisagé dans un futur trop lointain sans que les conditions précitées ne soient respectées.