[2018-01] - Date du mandatement d’un achat immobilier d’une commune.

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
Affichages : 1278

JO Sénat du 14 décembre 2017, p. 4493. Rép. minist. n° 01134.

Saisi de la question de savoir si le mandatement d’un achat immobilier fait par une commune doit intervenir lors du visa de l’acte authentique dressé par le notaire ou lors du visa du retour de l’acte de la conservation des hypothèques comme semblent l’exiger certains comptables publics, le ministre de l’action et des comptes publics a indiqué que le paiement des acquisitions immobilières réalisées par les collectivités territoriales et leurs établissements publics doit être réalisé dans le respect des règles de la comptabilité publique, qui visent à garantir la préservation des deniers publics au regard des droits concurrents pouvant exister sur l’immeuble. Ces droits peuvent être de deux formes. D’une part, l’immeuble dont l’acquisition est poursuivie peut être grevé d’hypothèques, de privilèges spéciaux immobiliers ou de nantissements pris du chef du vendeur. D’autre part, le vendeur peut avoir conclu antérieurement avec une autre personne, une vente ou un compromis de vente. Ces droits concurrents exposent la collectivité territoriale souhaitant devenir propriétaire de l’immeuble à «payer deux fois», au titre du droit de suite des créanciers inscrits ou pour désintéresser le propriétaire réel de l’immeuble. Or, conformément à l’article 19 du décret n°  2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, le comptable doit, à peine d’engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire, s’assurer «du caractère libératoire du règlement», c’est-à-dire vérifier que le véritable propriétaire de l’immeuble est désintéressé et qu’il n’existe pas de créanciers inscrits sur l’immeuble. À ce titre, les comptables publics sont amenés à exiger, lorsque l’acquisition est réalisée par acte administratif, non seulement la mention de publication de l’acte authentique au fichier immobilier, procédure qui rend la vente opposable aux tiers, mais aussi la production des états-réponses délivrés par le service de la publicité foncière, qui attestent qu’il n’existe aucun droit concurrent sur l’immeuble. Lorsque l’acquisition est réalisée par acte notarié, les comptables sont déchargés de cet examen. En effet, les articles L. 2241-3, L. 3213-2-1 et L. 4221-4-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) disposent que lorsque les collectivités territoriales et leurs établissements publics procèdent à des acquisitions immobilières à l’amiable suivant les règles du droit civil, ou lorsque l’acquisition a lieu sur licitation, le notaire rédacteur de l’acte procède s’il y a lieu, sous sa responsabilité, à la purge de tous privilèges et hypothèques. En outre, les articles R. 2241-3, R. 3213-4, R. 4221-3, R. 5211-13-2 et R. 5212-1-1-1 du CGCT précisent que dans cette hypothèse, les comptables publics sont déchargés de toute responsabilité par la remise des fonds au notaire rédacteur de l’acte. Ainsi, lorsque l’acquisition est réalisée par acte notarié, c’est au notaire qu’il revient de s’assurer du caractère libératoire du règlement en lieu et place du comptable. La publication de l’acte n’a aucune incidence sur ce transfert de responsabilité, raison pour laquelle la preuve de la publication de l’acte au fichier immobilier n’a pas à être exigée et le comptable n’a pas à se faire délivrer les états réponses produits par le service de la publicité foncière. Le notaire doit simplement attester qu’il n’existe pas à sa connaissance, de vente ou de promesse de vente antérieure, hypothèses que les articles législatifs précités n’ont pas couvertes. La rubrique 51 «Acquisitions amiables d’immeubles» de la liste des pièces justificatives annexée au Code général des collectivités territoriales, que le comptable peut exiger pour prendre en charge une dépense, traduit très exactement cet état du droit. Le mandatement du prix d’un immeuble acquis par une collectivité territoriale par acte notarié peut donc intervenir sans que soit apportée la preuve que l’acte authentique ait été publié au fichier immobilier.