[COPROPRIETE] - Réponse ministérielle.- Clause de priorité pour la vente des parkings

par Guilhem GIL - Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Rép. minist. n° 19730. JOAN Q du 15 octobre 2019, p. 9038.

La ministre de la justice a été saisie d’une question parlementaire relative à l’insertion, dans un règlement de copropriété, d’une «clause de priorité» lors de la vente d’un lot à usage exclusif de stationnement et proposant de modifier la législation en vue d’admettre une telle insertion à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés le jour de l’assemblée générale. Après avoir rappelé le dispositif de  l’article 8-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, la ministre a indiqué  que cette clause de priorité, introduite par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, ne peut être mise en œuvre que dans le cas où le règlement de copropriété le permet dès son origine, ou si le règlement est modifié en ce sens. La clause de priorité oblige le copropriétaire, préalablement à la conclusion de toute vente d’un ou plusieurs lots à usage de stationnement, de faire connaître au syndic par lettre recommandée avec demande d’avis de réception son intention de vendre, en indiquant le prix et les conditions de la vente. Cette information, transmise sans délai à chaque copropriétaire par le syndic par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, aux frais du vendeur, vaut offre de vente pendant une durée de deux mois. Si cette offre est acceptée par un copropriétaire, le vendeur est tenu de vendre en priorité son bien à ce dernier plutôt qu’à un tiers.  L’application de la clause de priorité modifiant les modalités de jouissance d’une partie privative, il n’est pas juridiquement possible d’envisager une modalité d’adoption simplifiée de cette clause dans le règlement de copropriété ainsi que le suggère la question posée. Une décision prise à l’unanimité des copropriétaires s’impose. Par ailleurs, inscrire dans la loi que cette clause est obligatoire, pour permettre son adoption à la majorité simple en application de l’article 24 f) de la loi du 10 juillet 1965, aurait pour effet de créer un nouveau droit de préemption. Or les droits de préemption, en raison de l’atteinte qu’ils constituent au droit d’un propriétaire de disposer librement de son bien, sont admis par le Conseil constitutionnel qui s’est prononcé plusieurs fois sur la constitutionnalité du droit de préemption. A chaque, fois, le Conseil examine si le dispositif prévu par le législateur garantit bien que son titulaire utiliserait le bien préempté conformément au motif d’intérêt général qui justifie la restriction apportée au droit de propriété du vendeur du bien préempté. Cette restriction a été acceptée pour des impératifs tels que le droit au maintien de son logement (article 15 II de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) ou des impératifs de politique d’urbanisme strictement encadrés par les dispositions des articles L. 211-11 et suivants du Code de l’urbanisme, sous certaines conditions. Au vu des critères retenus par le Conseil constitutionnel, transformer le droit de priorité prévu à l’article 8-1 de la loi du 10 juillet 1965 en un droit de préemption ne paraît pas possible, le motif d’intérêt général «n’étant pas évident».