[2017-05] - Changement d’affectation des lots.

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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JOAN Q du 21 mars 2017, p. 2459. Rép. minist. n° 97541.

Interrogée sur les changements d’affectation de lots de copropriété constitués notamment par la transformation d’appartements en chambres meublées, la ministre du logement a souligné que l’article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, modifié par l’article 59 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, pose le principe de la libre disposition des parties privatives pour chaque copropriétaire sous réserve de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires, ni à la destination de l’immeuble. L’article 8 de la même loi énonce également que la destination de l’immeuble peut justifier des restrictions aux droits des copropriétaires. Changer l’affectation d’un lot consiste à utiliser ce lot pour un usage autre que celui pour lequel il est prévu (habitation, local commercial, activité libérale, etc.), ou pour un usage contraire à la destination de l’immeuble (activité de restauration dans un immeuble d’habitation bourgeoise par exemple). Consentir une location meublée peut constituer un changement de destination, selon ce que stipule le règlement de copropriété. Si la destination du lot y est définie en termes généraux, le changement de destination est possible soit parce que la nouvelle destination est conforme aux stipulations du règlement de copropriété, soit parce que la nouvelle destination respecte les prescriptions de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 précitée, c’est-à-dire qu’elle ne porte pas atteinte à la destination générale de l’immeuble ou aux droits des autres copropriétaires ; ainsi en a jugé la Cour de cassation dans son arrêt du 4 juillet 2012. Si la destination du lot est définie en termes précis, le changement de destination nécessite le consentement des autres copropriétaires réunis en assemblée générale ; la décision votée en assemblée générale peut requérir soit l’unanimité soit un quorum spécifique [sic ! NDLR], selon les stipulations du règlement de copropriété (Cour d’appel de Paris, 4 octobre 1993 n° 92-903). La location meublée peut aussi induire un changement d’usage, régi par les articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation, dans les communes de plus de 200 000 habitants et les départements de petite couronne en région parisienne. Lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, c’est-à-dire un logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, l’autorisation administrative de changement d’usage n’est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile. Mais s’il ne s’agit pas de la résidence principale du loueur, une autorisation administrative préalable est requise. La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 15 juin 2016, énonce que : «si l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation impose, préalablement à tout changement d’affectation d’un local à usage d’habitation, l’obtention d’une autorisation préfectorale, il s’en déduit nécessairement que n’est plus considéré comme affecté à l’habitation un local transformé en meublé de courte durée à vocation touristique ou d’affaires. Une location en meublé n’est pas, en elle-même, contraire à la destination bourgeoise d’un immeuble, à moins qu’elle ne s’exerce pour des locations de courte durée avec fournitures de services annexes (ménage, fournitures de literie, transferts vers l’aéroport) qui apparentent cette exploitation à une activité commerciale et non plus civile, étant observé que si l’activité de loueur en meublé est juridiquement de nature civile, elle est fiscalement de nature commerciale, étant imposée au titre des bénéfices industriels et commerciaux». À défaut pour le bailleur d’obtenir une telle autorisation administrative, le contrat est nul de plein droit et le cas échéant, sujet à la sanction pénale prévue à l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation.