JOAN Q du 5 juin 2018, p. 4816. Rép. minist. n° 2855.
Interpellé sur la suppression de la possibilité pour les communes et les PME de recourir aux baux emphytéotiques administratifs (BEA) pour l’exécution de leurs travaux, le ministre de l’intérieur a rappelé que l’’article 101 de l’ordonnance n° 2015-899 relative aux marchés publics a modifié les dispositions des articles L. 2122-6 du Code général de la propriété des personnes publiques et L. 1311-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), en disposant qu’une autorisation d’occupation du domaine public ainsi qu’un bail emphytéotique administratif (BEA) «ne peut avoir pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures, la prestation de services, ou la gestion d’une mission de service public, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, pour le compte ou pour les besoins d’un acheteur soumis à l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ou d’une autorité concédante». En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu, d’une part, distinguer les instruments d’occupation domaniale et les contrats de la commande publique, et d’autre part, prohiber explicitement toute utilisation du BEA en tant qu’instrument de la commande publique. Cette interdiction, qui vise également à lever une insécurité juridique, liée au risque de requalification du BEA en marché ou en délégation de service public, parachève une évolution, tant de la jurisprudence que du droit positif. Dans son arrêt du 10 juin 1994, Commune de Cabourg (n° 141633), le Conseil d’État avait notamment posé comme principe qu’un BEA adossé à un contrat de la commande publique (marché public, délégation de service public notamment) devait faire l’objet d’une publicité et d’une mise en concurrence préalables. L’article L. 1311-2 du CGCT, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI II), avait consacré cette interprétation en disposant que les BEA devaient faire l’objet de telles formalités «le cas échéant», c’est à dire chaque fois que le droit national ou le droit européen de la commande publique l’exigent. De même, par analogie avec la cession immobilière avec obligation pour l’acquéreur de réaliser des travaux, il est vraisemblable que même si l’on appliquait l’article L. 1311-2 du CGCT dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 23 juillet 2015 précitée, le juge administratif requalifierait un BEA en marché public si l’objet principal du contrat visait à la réalisation d’un ouvrage (par exemple, tribunal administratif de Montpellier, 21 septembre 2017, Association Les amis de Jean Moulin). Il n’est donc pas envisageable, à supposer que l’avantage économique sur le long terme soit établi, de modifier l’article L. 1311-2 du CGCT pour réintroduire, pour les communes, le droit de conclure des BEA pour l’exécution de travaux ou l’entretien de leur parc immobilier.