Sénat, Rapport de la Commission des affaires économiques, Réduire le coût du foncier, 4 mars 2020, par Dominique Estrosi-Sassone et Valérie Létard.
La Commission des affaires économiques du Sénat a apporté un certain nombre de modifications à la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français. Alors que l’article 1er du texte envisageait l'interdiction de la vente aux enchères des immeubles de l'État, des collectivités locales, de leurs groupements et de leurs établissements publics, dans les zones urbaines tendues, à l'exception des lots de copropriété, la commission a supprimé l'interdiction des ventes aux enchères pour les collectivités territoriales en considérant que cette modalité présente une réelle utilité pour assurer la transparence d'une vente et trouver le juste prix, souvent inférieur à l'évaluation domaniale. La Commission a également supprimé l’article 2 prévoyant l'habilitation du gouvernement à créer par ordonnance, dans un délai d'un an, des organismes fonciers libres et un bail réel libre. Pour mémoire, les organismes fonciers libres (OFL) seraient détenus à majorité par des personnes publiques. Ils auraient pour objet d'acquérir et de gérer du foncier pour réaliser tous types d'opérations immobilières (logements, commerces, bureaux, équipements publics) en vue de la location ou de l'accession. Le bail réel libre (BRL) organiserait la séparation du foncier et du bâti et serait prorogeable, sans condition de loyer ou de prix de cession y compris lors des mutations successives, à l'exception des zones tendues. La commission a en effet tout d’abord estimé qu'il n'était pas normal qu'une initiative parlementaire aboutisse à ce que le Parlement se dessaisisse d'un sujet essentiel, en l'espèce la définition d'un nouveau droit de propriété, sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État. Plus fondamentalement, les sénateurs ont estimé que, si la séparation du foncier et du bâti apparaît pertinente pour produire des logements plus abordables, il n'y a aucun besoin d'un outil nouveau et qu’il convient au contraire de conforter l'existant pour ne pas complexifier les choses. La commission a donc a adopté plusieurs amendements. Le premier vise à permettre aux OFS, par exemple des organismes HLM, de vendre une partie de leurs logements existants sous la forme de BRS. Un autre a comme objet d’étendre la compétence des OFS aux locaux commerciaux et professionnels situés au bas des immeubles d'habitation pour faciliter leur intervention dans le cadre de la réhabilitation des centres bourgs et de donner un nouvel outil aux maires. Un dernier vise à faciliter le relèvement du plafond de ressources du BRS au niveau du prêt locatif social (PLS) accession pour introduire plus de mixité et permettre aux classes moyennes d'y accéder.
La Commission a également supprimé l'article 4 qui prévoyait la création d'un fonds pour la dépollution des friches géré par Action logement. Elle a considéré qu’Action logement n'est pas compétent en matière de dépollution et que la création d'un fonds public doit être mûrement réfléchie pour ne pas affaiblir le principe pollueur-payeur. Ont subi le même sort les articles 6 bis de la proposition (suppression du caractère d'urgence dans les procédures de déclaration d'utilité publique pour création de réserves foncières) et 7 (obligation pour les communes de délibérer une fois par an, préalablement à l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent, sur la mise en œuvre du plan local de l'habitat (PLH) sur la base d'une analyse de l'observatoire foncier). A en revanche échappé au couperet l’article 5 de la proposition prévoyant la réorganisation des relations entre les collectivités territoriales et le service du Domaine pour l'évaluation foncière. En vertu de ce texte, les avis domaniaux seraient désormais communiqués avec l'ensemble des éléments justifiant l'estimation. Ils seraient susceptibles d'appel. En complément, les collectivités pourraient faire appel à des experts judiciaires. Les petites communes pourraient solliciter le service du Domaine. La commission a approuvé les évolutions proposées par l'article 5 et a même élargi la liste des experts que pourront saisir les collectivités pour faciliter cette nouvelle pratique.