Proposition de loi n° 3060 tendant à garantir l’efficacité des aides personnelles au logement.
A la suite de son adoption en première lecture par la Sénat, a été transmise à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à garantir l'efficacité des aides personnelles au logement. A l’origine, cette proposition de loi contenait quatre mesures : la suppression du non-versement des APL lors du mois de la première demande, dit «mois de carence», l’abrogation du seuil de non-versement des APL, actuellement fixé à 10 euros par mois, le maintien des APL, en cas d’impayés de loyer dans le cadre d’une crise sanitaire, et la ré-indexation des APL sur l’indice de référence des loyers (IRL) en 2020. Le Sénat, suivant les préconisations de sa Commission des affaires économiques, en a retenu deux.
La première mesure conservée concerne la suppression du mois de carence (art. 1er). Le non-versement du premier mois lors de la première demande des APL existe depuis 1995 et permet d’économiser environ de 250 millions d’euros par an. Considérant que cette mesure pénalise un nombre important de personnes, estimé à 1,2 million de ménages chaque année et qu’elle connaît déjà de nombreuses exceptions (au profit des personnes hébergées temporairement et qui accèdent à un véritable logement, de celles qui sont logées en foyer, qui avaient un logement insalubre ou encore qui sortent de la prostitution ou perçoivent les minima sociaux), les sénateurs ont estimé que la suppression de ce mois de carence apparaissait à la fois comme une mesure de simplification et de justice sociale. La seconde mesure conservée a trait à la ré-indexation des APL sur l’IRL (art. 4). Depuis 2017, l’indexation des APL, normalement basée sur l’IRL, a été gelée ou limitée à 0,3 %, aboutissant à une érosion du pouvoir d’achat des ménages les moins favorisés. Malgré les 300 millions d’euros qu’elle permettrait d’économiser sur 2019 et 2020, les sénateurs, se faisant l’écho d’une demande forte des associations de locataires et du mouvement HLM, ont entériné le rétablissement de l’indexation des APL sur l’IRL en 2020,
En revanche, le Sénat n’a pas soutenu les deux autres mesures contenues dans la proposition de loi. A tout d’abord été écartée la disparition du seuil de non-versement de 10 euros. Les sénateurs ont estimé que le seuil de non-versement n’est pas une mesure d’économie mais de gestion. Cette règle touche 17 000 ménages pour un montant d’APL moyen de 60 euros par an, alors que les frais d’instruction d’un dossier par la caisse d’allocations familiales (CAF) sont évalués entre 80 et 90 euros. Par ailleurs, les sénateurs ont souligné que ce seuil a déjà été abaissé, en 2017, de 15 à 10 euros dans le parc privé et dans le parc social, il a été supprimé compte tenu du risque d’un effet cumulé de la baisse des APL et de la réduction de loyer de solidarité (RLS). N’a pas davantage été retenue la disposition visant à maintenir les APL dans le cas d’impayés lors d’une crise sanitaire. Le Sénat a considéré que les dispositifs existant au profit des locataires de bonne foi, qui font face à une baisse de leurs ressources, étaient déjà très complets. En effet, dès lors que le locataire accepte de s’inscrire dans un plan d’apurement et de payer une partie des charges du logement, les APL continueront d’être versées. La loi ALUR, en 2014, puis la loi ELAN, en 2018, ont renforcé les dispositifs de prévention des expulsions en coordonnant les procédures de surendettement avec celles d’expulsion, en renforçant les commissions de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) et en facilitant le recours au droit au logement opposable (DALO). Dès lors, l’ajout du motif de la survenue d’une crise sanitaire pour maintenir les APL, bien que compréhensible, n’est pas apparu juridiquement pertinent car n’apportant pas de droit supplémentaire.