Cons. constit., 28 mai 2020, QPC 2020-843.
Le Conseil Constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur une partie de l'article L. 311-5 du Code de l'énergie relatif à l’autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité. Au-delà de la non-conformité, strictement encadrée dans le temps, du texte résultant de l’absence de dispositif permettant la participation du public à l'élaboration de cette décision, l’intérêt de la réponse du Conseil se situe essentiellement dans l’analyse du régime juridique des ordonnances non ratifiées. Ainsi que l’indiquent les services du Conseil Constitutionnel, l’une des difficultés de l’espèce provenait du fait que l’ordonnance dont était issue l’une des dispositions permettant de résoudre la question n’a jamais été ratifiée par le Parlement. Selon la jurisprudence antérieure du Conseil, des dispositions issues d’une ordonnance non ratifiée, ne revêtent pas le caractère de dispositions législatives au sens de l’article 61-1 de la Constitution. Il n’y avait donc pas lieu, pour lui, d’en connaître (Cons. constit., 10 févr. 2012, n° 2011-219, QPC). Néanmoins, une fois expiré le délai d’habilitation consenti par le Parlement au gouvernement, les ordonnances non ratifiées ne peuvent, en vertu du dernier alinéa de l’article 38 de la Constitution, plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. Dès lors, selon la jurisprudence du Conseil d’État, seule une loi ou une nouvelle ordonnance peut modifier les dispositions relevant matériellement du domaine de la loi contenues dans une ordonnance (CE, 11 décembre 2006, n° 279517). Après avoir rappelé que les dispositions de l’ordonnance non ratifiée ne pouvaient plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif, le Conseil Constitutionnel en a déduit, d’une façon que ses propres services qualifient d’inédite, qu’à compter de cette date, correspondant à l’expiration du délai d’habilitation, ces dispositions doivent être regardées comme des dispositions législatives. Procédant ainsi à un revirement, le Conseil constitutionnel s’est, pour l’avenir, reconnu compétent pour contrôler, par la voie de la QPC, la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions d’une ordonnance non ratifiée, à la double condition que ces dispositions interviennent dans des matières du domaine législatif et que le délai d’habilitation fixé par le Parlement ait expiré. Selon le Conseil, cette évolution ne remet pas en cause les autres voies de recours permettant de contester ces dispositions, au regard d’autres motifs que leur conformité aux droits et libertés constitutionnellement garantis.