Les modes particuliers d’acquisition de la propriété publique (II) : les biens sans maître et ceux présumés l’être
- par Samuel DELIANCOURT, Premier conseiller CAA de Lyon
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Le livre III du Code civil (art. 711 et s.) porte sur les différentes manières dont les personnes privées, mais publiques également, peuvent acquérir la propriété. Après la transmission par voie de succession et obligations (art. 711), l’acquisition par incorporation, accession et prescription (art. 712) et avant de faire état des «choses qui n’appartiennent à personne et dont l’usage est commun à tous» (art. 714), c’est-à-dire les res communis, l’article 713 dispose : «Les biens qui n’ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés (…)». Sa rédaction antérieure à 2004 était la suivante : «Les biens qui n’ont pas de maître appartiennent à l’Etat». Cette problématique de l’immeuble dont le propriétaire est décédé et/ou n’est pas connu n’est nullement nouvelle et marginale. Des milliers d’immeubles n’ayant pas ou plus de propriétaires, les dispositions applicables du Code général de la propriété des personnes publiques et du Code civil offrent la possibilité à l’Etat, aux communes et aux EPCI à fiscalité propre d’acquérir ces propriétés foncières.
Le régime de ces biens dits «vacants et sans maître» a été précisé par les dispositions des articles L. 25, L. 27 bis et L. 27 ter du Code du domaine de l’Etat faisant suite à l’adoption de la loi n° 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d’orientation agricole. Elles ont sensiblement été modifiées à la suite de l’entrée en vigueur de l’article 147 de loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et des articles 98 et 99 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dire loi «3 DS».
Le Code général de la propriété des personnes publiques distingue les biens qui sont sans maître de ceux présumés l’être. L’article L. 1123-1 dudit Code, qui figure dans le «Titre II : Acquisitions à titre gratuit», définit deux situations : «Sont considérés comme n’ayant pas de maître les biens autres que ceux relevant de l’article L. 1122-1 et qui : 1° Soit font partie d’une succession ouverte depuis plus de trente ans et pour laquelle aucun successible ne s’est présenté (…) ; 2° Soit sont des immeubles qui n’ont pas de propriétaire connu et pour lesquels depuis plus de trois ans les taxes foncières n’ont pas été acquittées ou ont été acquittées par un tiers. Ces dispositions ne font pas obstacle à l’application des règles de droit civil relatives à la prescription».
Cette disposition renvoie en réalité à trois situations distinctes. La première, par le renvoi opéré à l’article L. 1122-1 de ce même Code, concerne l’appropriation par l’Etat des successions en déshérence, c’est-à-dire celles ouvertes sans qu’aucun successible ne se soit présenté, lesquelles ne doivent pas être confondues avec les successions vacantes dont l’Etat assure seulement la gestion (I). Quant à l’article L. 1123-1, il concerne les biens sans maître (art. L. 1123-1,1°) lorsque la succession est ouverte depuis plus de trente ans, délai réduit dans certains cas à dix ans, lorsqu’aucun successible ne s’est présenté (II), ainsi que les immeubles présumés être sans maître (art. L. 1123-1,2°), au profit des bénéficiaires de premier rang que sont les communes et les EPCI à fiscalité propre, lorsque, après recherches, aucun propriétaire ne s’est manifesté ou n’a pu être retrouvé (III).
I.- L’Etat et les successions vacantes et en déshérence
Un héritier désigné par la loi ou par testament dispose d’un droit d’option (option successorale) lors de l’ouverture de la succession : il peut l’accepter à concurrence de l’actif net, c’est-à-dire dans la limite des biens du défunt, ou y renoncer. Selon l’article 768 du Code civil, en effet, «L’héritier peut accepter la succession purement et simplement ou y renoncer. Il peut également accepter la succession à concurrence de l’actif net lorsqu’il a une vocation universelle ou à titre universel. Est nulle l’option conditionnelle ou à terme». Les successions vacantes doivent être distinguées des successions en déshérence qui recoupent deux réalités différentes et font l’objet de régimes distincts.
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Vous avez lu 13 % de l'article paru dans les Annales des Loyers N° 11 de novembre 2023
À suivre
A.- L’Etat, administrateur des successions vacantes
B.- L’Etat, propriétaire de plein droit des successions en déshérence
II.- L’acquisition par la commune des immeubles sans maître en cas de succession ouverte depuis trente, voire dix ans
A.- Le délai trentenaire de droit commun
B.- Un délai réduit à dix ans pour les immeubles situés en zones particulières
III.- L’acquisition par la commune des biens présumés sans maître en l’absence de propriétaire connu
A.- L’extension du bénéfice de cette procédure initialement réservée à l’Etat aux communes
B.- Le régime de la dévolution des biens présumés sans maître
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