Le syndicat des propriétaires riverains d’une voie privée

par Pierre-Edouard Lagraulet, Avocat au barreau de paris, Docteur en droit
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Propriétaires riverainsDans la famille des syndicats et associations de propriétaires, le «syndicat des propriétaires riverains d’une voie privée», dit aussi «syndicat d’assainissement des voies privées» fait figure de parent oublié et d’objet juridique mal identifié. 

Ce syndicat, personne morale ayant caractère d’établissement public, est pourtant défini et régi par un texte spécial : la loi du 22 juillet 1912 relative à l’assainissement des voies privées. 

La loi du 22 juillet 1912 assujettit les voies privées aux mêmes exigences de salubrité et d’assainissement que les voies publiques, dans la mesure où son article 1er, codifié depuis à l’article L. 162-6 du Code de la voirie routière, prévoit que «les lois et règlements relatifs à l’hygiène des voies publiques et des maisons riveraines à ces voies sont applicables aux voies privées, notamment en ce qui concerne l’écoulement des eaux usées et des vidanges et l’alimentation en eau. Toutes les parties d’une voie privée dans laquelle doit être établie un égout ou une canalisation d’eaux sont grevées d’une servitude légale à cet effet». Au-delà de cette règle générale, ce texte prévoit à travers dix-huit articles l’organisation d’un groupement afin d’assainir les voies privées, parfois laissées à l’abandon par les riverains qui en sont les propriétaires.

Malgré l’existence de ce texte, toujours en vigueur, ce syndicat est sans doute le plus méconnu de sa «famille». En ce sens, on le confond très souvent avec ses plus proches parents, les associations syndicales autorisées et forcées, du fait qu’il résulte aussi de la volonté des pouvoirs publics et qu’il émane historiquement d’une forme issue de la loi du 21 juin 1865, de même que les groupements issus des lois contre les lotissements défectueux, de remembrement ou de reconstruction et de remembrement urbain. C’est ce qui engendre une certaine «cacophonie» pour reprendre le terme d’un auteur, dans la mise en œuvre de ce dispositif et parfois dans la définition de la nature du groupement. Cette «cacophonie» résulte en partie du fait que le syndicat de riverains est défini comme une «association régie par des textes particuliers» par le titre VI de l’ordonnance du 1er juillet 2004. Il a à ce titre, une forme d’association syndicale et il arrive souvent en pratique que le syndicat soit dénommé association syndicale en raison de son «lien de parenté», ce qui n’est pas sans risque de confusion. C’est pourquoi il est nécessaire rappeler la stricte différence entre ces structures ainsi qu’à pu le faire avec rigueur le Conseil d’Etat. Au regard des errements parfois constatés en pratique, il nous paraît en effet utile, à travers cette étude, de rappeler les spécificités de ce groupement, toujours spécialement défini et organisé par la loi du 22 juillet 1912. En ce sens, il conviendra au cours de cette étude de toujours le nommer «syndicat des propriétaires riverains d’une voie privée» ou «syndicat d’assainissement» et jamais association syndicale autorisée ou forcée. Ces dernières formes associatives sont spécifiquement définies par l’ordonnance de 2004 et se distinguent nettement, tant dans le processus de leur formation, que d’administration, du syndicat de riverains dont l’objet est également bien plus restreint. Comme nous le verrons, le syndicat d’assainissement ne peut exister qu’aux fins d’assainir une voie privée, dont la propriété est répartie entre plusieurs riverains de manière hétérogène. La voie privée est appropriée par fragments par chaque propriétaire riverain, le plus généralement par moitié, au droit de la façade de son immeuble. C’est ainsi que le syndicat de riverains est également exclusif du syndicat de copropriétaires, ce compris en application de l’article 1, II, de la loi du 10 juillet 1965 car il n’y a pas, ici, strictement d’éléments ou de services communs. 

A la lumière de ces quelques éléments, il est déjà possible de se rendre compte de la spécificité de ce groupement, dont la spécialité de l’objet renforce le particularisme. Celui-ci est légalement limité à l’assainissement de la voie, ce qui explique que son mode de formation (I), qui définit sa nature mais aussi ses modes d’administration (II) et de dissolution (III), sont distincts de tout autre groupement de propriété connus par la loi de 1965 et l’ordonnance de 2004.

Article paru dans les Annales des Loyers N° 12 de décembre 2021

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