La réforme du droit des sûretés et les sûretés immobilières

par Olivier GOUT, Professeur à l'Université Jean Moulin, Lyon III
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Immobilier - réforme du droit des sûretésL’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, portant réforme du droit des sûretés, marque une nouvelle page de l’histoire de cette discipline. Les sûretés personnelles, et tout particulièrement le cautionnement, sont les grandes bénéficiaires de cette évolution. Cela s’explique, notamment, par le fait que la précédente réforme du droit des sûretés de 2006 avait pris le parti de repousser la refonte de la plus emblématique des sûretés françaises. Elle méritait, disait-on à l’époque, un débat parlementaire. C’est pourtant le pouvoir exécutif qui vient de modifier le cautionnement puisque légiférer par voie d’ordonnance s’est, comme on le sait, «démocratisé» ces dernières années, n’en déplaise à ceux qui dénoncent la perte d’influence du Parlement. 

Même si, on l’aura compris, l’ordonnance de 2006 était en grande partie dédiée aux sûretés réelles, ces dernières sont, au moins pour certaines, largement impactées par les nouveaux textes. Cela se comprend aisément car il faut rappeler que l’entreprise de simplification voulue dès 2005 par le rapport Grimaldi, qui avait déjà inspiré à l’époque la réforme, n’avait pas été poussée jusqu’à son terme, en raison notamment des termes restrictifs de l’habilitation donnée au gouvernement. C’est désormais chose faite avec les nouveaux textes qui ont achevé de dépoussiérer la discipline pour faire de la matière un droit tourné vers la modernité. Au titre des innovations marquantes, on notera la création de la cession de créances à titre de garantie (v. art. 2373 et s.) ainsi que la création de la cession de sommes d’argent à titre de garantie (art. 2374 et s.). 

D’autres innovations concernent tout particulièrement les sûretés immobilières auxquelles cette étude est consacrée. Précisons, pour commencer, que les nouveaux textes entreront en vigueur le 1er janvier 2022, ce qui laisse un peu de temps, mais pas trop, aux praticiens pour se préparer. Les sûretés sur les immeubles, auxquelles un sous-titre III est toujours consacré, seront régies par les articles 2375 à 2488-5 du Code civil. Dans une rédaction inchangée, au regard de l’actuel article 2373, le nouvel article 2375 du Code civil rappelle, dans son premier alinéa, que les sûretés sur les immeubles sont les privilèges, le gage immobilier et les hypothèques. Le deuxième alinéa précise qu’à cette première liste de sûretés classiques, la propriété de l’immeuble peut également être retenue ou cédée en garantie. Sont clairement visées ici, comme on le sait, les techniques de la clause de réserve de propriété et de la fiducie-sûreté qui présentent la caractéristique de pouvoir concerner à la fois des biens meubles et immeubles.

Le gage immobilier n’a pas été retouché par la réforme. Il en va différemment des privilèges, de l’hypothèque et, dans une moindre mesure, des propriétés-sûretés. A cela, il convient d’ajouter que les auteurs de l’ordonnance ont souhaité régir le sort de la sûreté réelle pour autrui, autrefois dénommée «cautionnement réel», qui peut concerner, comme la clause de réserve de propriété et la fiducie sûreté, aussi bien les meubles que les immeubles.

Pour présenter la réforme nous nous intéresserons, dans un premier temps, aux sûretés exclusivement immobilières (I) puis, dans un second temps, aux sûretés possiblement immobilières (II).

Article paru dans les Annales des Loyers N° 11 de novembre 2021

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