[LOGEMENT SOCIAL] Veille.- Rapport.- Financement du secteur du logement locatif social

par Guilhem GIL-Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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IGF et CGEDD, La diversification des sources de financement du secteur du logement locatif social, 21 novembre 2019.

Une mission IGF-CGEDD a été chargée d’étudier l’opportunité et les conditions d’une diversification des modes de financement du logement social. Le document constate à titre liminaire que le modèle économique des bailleurs sociaux, qui repose sur le réemploi des rendements locatifs nets couplé à des subventions publiques et à des prêts à taux préférentiels distribués par la Caisse des dépôts et consignations, a été affecté par la hausse du coût de revient de ces opérations, la part moins importante des subventions publiques dans les plans de financement et la réduction de loyer de solidarité. S’interrogeant sur l’opportunité de diversifier les emprunts des bailleurs sociaux (financements bancaires, émissions obligataires), le document souligne qu’une telle diversification serait porteuse de grands risques, liés notamment à un effet d’antisélection conduisant à concentrer le «mauvais risque»au sein du Fonds d’épargne, ce qui aurait pour conséquence de diminuer sa capacité à prêter et à assurer une péréquation efficace au service des objectifs de la politique du logement social. Par ailleurs, le rapport estime que, quoique l’intérêt des investisseurs privés pour le logement social soit tangible, il s’agit d’un intérêt par défaut, lié à la baisse de la rentabilité des autres classes d’actifs dans l’immobilier, dans un contexte d’abondantes liquidités à investir. Or, non seulement cet intérêt pourrait n’être que passager, lié au contexte de taux, mais encore la zone géographique d’intérêt des investisseurs privés étant limitée essentiellement à l’agglomération parisienne, le stock de logements attractifs est faible. Outre la réticence des bailleurs sociaux à se départir de leur parc, le document souligne que les difficultés opérationnelles liées aux cessions d’éléments du parc social sont également nombreuses. L’élargissement de la vente en bloc ne pouvant constituer une solution systématique, et les mécanismes de démembrement de propriété ne répondant pas à la logique de rendement des investisseurs privés, ces solutions ne présentent pas d’intérêt pour des investisseurs institutionnels en recherche de rendement courant.

Le rapport évoque alors quatre pistes de réflexion. La première option serait la création d’un véhicule d’investissement ad hocdans laquelle le bailleur social apporterait la partie de son parc qu’il cherche à valoriser et des investisseurs privés achèteraient des parts du véhicule, en versant du numéraire au bailleur. Le véhicule d’investissement confierait ensuite la gestion du patrimoine qu’il détient au bailleur apporteur. En fin d’opération, après déconventionnement des logements, ceux-ci pourraient être cédés. Ce mécanisme supposerait cependant des dérogations aux règles de la commande publique afin d’éviter les impératifs d’une mise en concurrence et d’assurer au bailleur ayant apporté les logements sociaux d’en assurer la gestion locative pour le compte du véhicule. La deuxième possibilité consisterait à créer un nouveau statut de bailleur social, sous forme de foncière d’habitat social accessible sur option. Néanmoins, ce dispositif faisant naître une dualité au sein du logement social, avec deux régimes financiers différents, devrait être validé au préalable par la Commission européenne. Une troisième option consisterait à assouplir les règles applicables aux ESH et aux SEM pour permettre l’entrée à leur capital de nouveaux investisseurs. Cette voie présente cependant de nombreuses contraintes tenant notamment à la modification des règles applicables à toutes les ESH, alors que seules quelques-unes pourront bénéficier de l’entrée de nouveaux investisseurs. Enfin, une quatrième option serait de ne plus considérer le logement social à travers le prisme d’un secteur dédié mais de le définir par sa finalité. La puissance publique pourrait dès lors accorder un mandat de gestion locative sociale à durée limitée à tout acteur respectant un cahier des charges. Ces acteurs pourraient être des bailleurs sociaux ou privés, ou encore des particuliers bénéficiant de dispositifs de défiscalisation pour l’investissement locatif social. Toutefois, une telle solution rendrait moins praticable le pilotage comme la planification de la politique du logement social par les pouvoirs publics, au niveau national comme au niveau local.

À noter également

- Arrêté du 21 novembre 2019 fixant les modalités de calcul et de paiement de la cotisation additionnelle due à la Caisse de garantie du logement locatif social, JO du 24 novembre 2019.

- Arrêté du 14 novembre 2019 portant définition du format et des modalités de transmission des engagements et indicateurs des conventions d’utilité sociale des sociétés de vente d’habitations à loyer modéré, JO du 28 novembre 2019.